Du coup de theâtre au coup de bambou


 
  Résumé d'une des pages les plus tragiques du football français pour les nostalgiques, les masochistes et les Bulgares.
A deux matchs de la fin de ces éliminatoires pour la World Cup 94, il ne reste pour les Bleus qu'un petit  point à prendre (donc un match nul) en deux rencontres disputées à domicile pour voir Dallas et Chicago où les hôtels sont déjà résèrvés...





FRANCE – ISRAEL 13 Octobre 1993 Parc des Princes
(Eliminatoires zone Europe / groupe 6)

A l'aller, les Bleus s'étaient facilement imposés 4-0 à Tel-Aviv. Le retour s'annonce donc plutôt facile. Tout le monde est confiant. Le journal L'Equipe publie sa Une façon présidentielle americaine où l'on peut apercevoir Canto au premier plan de dos faire les ailes de la victoire devant une foule hystérique genre finale de SuperBowl. Le tout tapissé de drapeaux américains avec en gros titre L'AMERIQUE TERRE PROMISE...mauvais présage. Ca commence avec l'ouverture du score par les Israéliens dès la vingtième minute par l'avant-centre Harazi. Les Bleus réagissent et égalisent par l'intermédiaire de Sauzée „la patate“ sur un service en retrait de Ginola (28ème). Ils prennent même l'avantage par ce dernier qui mystifie le gardien israélien d'une frappe enroulée en pleine lucarne. El Magnifico régale le Parc et fait de loin son match le plus abouti chez les Bleus (Houiller aura quand même la lumineuse idée de le sortir à l'heure de jeu alors que les Bleus mènent au score). Avant la mi-temps, Thierry Roland envoie en direct son célèbre : „c'est in the pocket Jean Michel“. Le carnaval continue à la mi-temps avec la sono du Parc qui crache généreusement L'Amérique de Joe Dassin, histoire d'agrandir la pocket de Thierry.
2eme mi-temps, les Israéliens procédent par contre et en toute fin de match marquent deux buts  d'abord par l'intermédiaire de Berkovitch (83ème) et enfin Atar dans les arrêts de jeu (93ème). Apparement la pocket de Thierry avait un trou. L'Equipe titrera raisonnablement le lendemain : UN COUP DE THEATRE.





FRANCE – BULGARIE 17 Novembre 1993 Parc des Princes
(Eliminatoires zone Europe / groupe 6)

Match aller à Sofia, les Bleus perdent 2-0 dont un penalty provoqué par JPP himself qui traverse tout le terrain pour descendre Kostadinov, faute typique d'attaquant dira-t-on par la suite...
Le retour promet d'être sanglant voire glacial vu la température ambiante qui régne sur le Parc en ce soir de novembre 1993. La veille du match, Houiller déclare : „L'équipe ne s'exprime jamais mieux que quand elle se retrouve au pied du mur“, „Les joueurs je les sens bien accrochés à la rencontre. Ils ne donnent pas l'impression d'avoir déjà joué ce match dans la tête.“ Et ça commence plutôt bien. A la demi heure de jeu, sur un service impeccable de la tête de Papin, le „King“ fusille de près le brave Borislav Mihailov (qui manque d'y perdre sa perruque). 5 minutes plus tard, Emil Kostadinov dit un peu plus tard „le bourreau du Parc“, sort de l'ombre et place une tête entre la barre et la folle chevelure de Pedros (il y avait largement la place). Deuxième mi-temps, le Parc se crispe. Jusqu'à cette fameuse 89ème minute. Coup francs francais côté droit, à côté du poteau de corner, dans le camp bulgare. Guérin le joue court sur Ginola qui centre instantanément au troisième poteau. Récupération et contre bulgare à 200 km/h, le ballon finit dans les pattes "d' Emil et une nuit“ qui décide de rentrer dans l'histoire du football bulgare en balançant un missile sous la barre du Lama. Le chrono affiche 89 minutes et 58 secondes. Un véritable coup de bambou comme aime si bien  le dire Gerard Holtz. J'entends encore mon père se marrer à gorge déployée. A la télé, Houiller blanc comme un linge vient de croiser un fantôme. Jacquet (alors adjoint de Gégé) n'en revient pas. Kostadinov lui, n'en finit plus de courir et de zigzaguer comme un dératé, pousuivi par une meute de Bulgares hilares à nuques longues (sauf Letchkov).




EPILOGUE

Dans les heures qui suivent, les déclarations assassines tombent à commencer par Houiller : „Ginola a commis un crime contre l'équipe, je répéte, un crime contre l'équipe.“ Il ira jusqu'à qualifier le centre mortel de Ginola d'Exocet (missiles tirés depuis les sous-marins). Tout le monde ajoutera son grain de sel, et les hypothèses et critiques de tous genres, plus ou moins fumeuses, viendront étayer le „pourquoi du comment“ de ces deux revers. On notera la thèse des disputes internes entres joueurs (réglements de compte par presse interposée). Possible car à cette époque, l'équipe de France se compose uniquement de „Marseillais“, de  „Parisiens“ et quelques joueurs évoluant à l'étranger. La vie du groupe est divisée en trois clans distincts (chambres, car, repas, parties de cartes...).... vous avez dit „teamspirit“? Des joueurs diront même que c'est Papin, Cantona et Deschamps qui faisaient l'équipe dans le car... L'enclume la plus lourde tombe sans aucun doute sur la tête de David Ginola à qui seul on reprochera la non-qualification de l'équipe de France à commencer par Thierry et Jean mimi. Quelques uns iront même jusqu'à dire qu'un Di Meco se serait sacrifié en coupant Kostadinov en deux sur le dernier but. Encore possible, mais avec des „si“ je serais millionnaire moi aussi. Par ailleurs, lors de cette période, Danone enregistrera une forte baisse sur la vente de ses Délices Bulgares en supermarché.
Peu de temps après, Houiller démissionnera remplacé par Jacquet et son carnet noir. La suite on la connaît tous...