Makossa, kidnapping et bistouri


Lorsque on évoque chirurgie esthétique et  football, un patient s’impose immédiatement à mes yeux, ma référence d’antan au poste de gardien de but en la personne du fantasque René Higuita, Colombien pur sang made in Medellin. Je lui dois incontestablement mes premiers émois cathodiques en termes de football.
Avant
Le choc remonte au 23 juin 1990 et ce huitième de finale de la Coupe du Monde entre les surprenants Camerounais emmenés par François Omam-Biyik et l’élégante Colombie de Carlos Valderama. Dans l’enceinte du Stadio San Paolo de Naples et sous une chaleur torride, les deux équipes peinent à se départager. Il faut attendre les prolongations et la 106ème minute pour voir le vieux lion Roger Milla (38 ans) ouvrir la marque. Pour fêter ça, le vétéran camerounais gratifie le public napolitain de quelques pas de Makossa échangés avec le poteau de corner (danse déjà testé en phase de poule contre la Roumanie). Sans le savoir, Milla est à ce moment là en train de faire naître de futures vocations de buteur/danseur révolutionnant ainsi cet instant si jubilatoire qu’est la célébration d’un but. Un an plus tard, en finale de la Coupe Davis, Yannick Noah exploitera également le filon « danse africaine » avec le fameux Saga Africa (sorte de chenille de la brousse rythmée sur une instru de Snap!) en guise d’hommage au parcours des lions indomptables en Italie. Tous ces pas cadencés nous feraient presque oublier ce brave Higuita. Donc 1-0 but de Milla qui ne manque pas de doubler la marque 3 minutes plus tard non sans l’aide de Huigita qui sur l’action intègre directement le panthéon des gardiens passoires, quelque part entre Huard, Zubizarreta et Arconada. En se repassant l’action qui amène ce deuxième but, on ne peut s’empêcher de repenser avec nostalgie à ces matchs endiablés de l’école primaire, lorsque soudain un des gardiens (déterminé à s’attirer les faveurs de Sophie la plus belle des CM1) entamait un coast to coast périlleux, zigzaguant entre les petits du CP, les pneus et les buissons. Sauf que la chevauchée fantastique prend fin 99 fois sur 100 au premier contact avec l’attaquant adverse qui marque dans le but vide. Voilà exactement ce qui s’est passé avec Higuita sauf que c’était la Coupe du Monde. Malgré la réduction du score anecdotique des Colombiens quelques minutes plus tard, cette boulette envoya les Camerounais en quart de finale contre l’Angleterre.
Apres
 Pas dramatique dira René qui avec ce craquage devient une légende terrestre. Il faut bien avoué que l’animal ne passe pas inaperçu avec sa tête de narco trafiquant coiffée de longues Jehri Curl genre Ice Cube époque N.W.A. . Viennent les années fastes durant lesquelles l’enfant du Barrio Castilla flirte avec le Milieu (cocaïne, kidnapping, Pablo Escobar, corruption) tout en continuant de se shooter au foot. Et la chirurgie dans tout ça? 
En 2005, « el loco » enchaîne les émissions de télé réalité et décide de subir une opération de chirurgie plastique au visage durant l’émission Cambio Extremo. Heureusement sa tignasse de Jehri Curl est épargnée pour le plus grand bonheur des amateurs de frisottis au Pento.
Enfin côté terrain on gardera surtout en mémoire son coup du scorpion à Wembley (pour la photo, car il savait que l’action était hors-jeu) et ses nombreux coups-francs bazooka à faire chavirer d’hystérie un stade tout entier.